#6 – Première approche de l’urbanisme sportif à l’aune de la psychologie urbaine

#6 – Première approche de l’urbanisme sportif à l’aune de la psychologie urbaine

La vie en ville comporte son lot de facteurs de stress, et de facteurs de protection.

Pour faire face aux irritants du quotidien et au stress urbain, la fréquentation des espaces extérieurs est souvent évoquée.

Ce sont les lieux de différentes activités, notamment sportives, nécessitant des aménagements particuliers. On assiste alors à l’émergence d’un urbanisme sportif attentionné, s’attachant à développer les pratiques sportives en milieu urbain bénéfiques pour la santé physique, mais aussi mentale des citadin-es.

Les bienfaits du contact des citadin∙es avec des espaces extérieurs sont connus de longue date. Moris (2003) cite alors Ulrich et Parsons (1992) qui rappellent que dans la Mésopotamie antique, les Égyptiens et les Perses considéraient déjà que les villas et les grands jardins étaient nécessaires au maintien du contact avec la nature pour les habitants∙es des zones urbaines.

Aujourd’hui, de très nombreuses études traitent des bienfaits des activités en plein air et/ou sportives sur les individus, justifiant le développement de ces infrastructures.

Au-delà des bénéfices largement reconnus de l’activité extérieure et sportive sur la santé physique et ses retombées économiques positives (diminution des coûts de santé), les hypothèses expliquant les mécanismes et bienfaits des activités extérieures sur la santé mentale et le développement individuel et interindividuel des citadin.es sont plus rarement évoquées :

Deux hypothèses physiologiques présentées par Lubans, Plotnikoff et Lubans (2011) décrivent les variations des taux de neurotransmetteurs (notamment la noradrénaline et la sérotonine) conduisant à une augmentation du mieux-être social et émotionnel.

Au niveau des mécanismes psychologiques à l’œuvre, l’attention se porte sur le sentiment de réalisation de soi et de maîtrise de son corps. Ces deux éléments seraient ainsi associés à une amélioration du bien-être et de l’estime de soi (Lubans, Plotnikoff et Lubans, 2011).

Ajoutons ici une hypothèse explicative relative à la psychologie sociale et de sa théorie de l’identité sociale (et urbaine) : les activités physiques en extérieur permettent de rencontrer de nouvelles personnes et sont ainsi vectrices d’une identité urbaine positive.

Le concept d’identité urbaine se place dans la continuité de la théorie de l’identité sociale développée par Tajfel (1978) selon laquelle l’identité sociale, l’appartenance à un groupe social et l’adoption de comportements attachés à ce groupe, est une partie du concept de soi.

Aussi, le sport est un médium pour l’apprentissage chez les enfants, les espaces de jeux ont des implications psychosociales importantes. En effet, ils leur permettent, entre autres, de développer des compétences cognitives (mémoire, capacités d’apprentissage, résolution de problèmes) ainsi que leur résilience émotionnelle (découverte et adaptation à de nouvelles situations) (Helleman G., 2018). Frost (2006) traite également de l’amélioration de la perception du risque chez les enfants au travers des jeux en extérieur.

 

Face à l’ensemble de ces impacts positifs, certains éléments peuvent limiter voire contrarier l’accès aux espaces sportifs extérieurs. C’est le cas notamment de certaines représentations sociales – tel que la perception parentale du risque pour les enfants et adolescent.es.-, de l’appartenance (réelle ou présumée) à certains groupes sociaux (ex. genre, classe sociale) et de l’état de santé (mentale et/ou physique) des individus.

Si ces limites d’accès et d’usages sont principalement liées à des mécanismes psychosociaux, la manière de penser et de concevoir les espaces sportifs, en pluridisciplinarité et en collaboration avec les usagers du quotidien, permettent de les dépasser. 

Il convient d’analyser, de questionner, de mesurer le vécu (objectif et subjectif) et les stratégies de contournement des usagers, pour mieux saisir les difficultés spécifiques des différents publics et, ainsi, favoriser l’inclusivité de ces espaces ouverts à tous.

Pour exemple, la psychologie urbaine questionne les représentations sociales des espaces de jeux, ou encore le sentiment de sécurité :

Les parents, et notamment la « perception parentale du risque » jouent un rôle essentiel. Munoz (2009) cite une étude de Beets et Foley (2008) indiquant que le niveau d’activités physiques des enfants est moins lié aux indicateurs statistiques de sécurité du quartier où il∙elles résident, mais plutôt au degré de sécurité perçue par leurs parents. Ainsi, ce dernier insiste : dessiner des espaces extérieurs pour les enfants ne consistent pas seulement à dessiner des espaces pour que les enfants puissent y jouer, mais nécessite que l’on prenne en compte les peurs et anxiétés parentales pour que les enfants soient autorisé∙es à utiliser ces espaces. Mimi (2018) définit d’ailleurs quatre thèmes, applicables à l’urbanisme sportif, à prendre en compte dans le design urbain de façon à favoriser une bonne santé mentale : les espaces doivent être verts, actifs, sociaux et safe.

Ainsi, parce que la psychologie urbaine apporte une lecture des comportements et des perceptions des individus spécifiques à l’espace aménagé, l’alliance entre psychologie urbaine et urbanisme sportif œuvre pour le développement d’infrastructures sportives accessibles, adaptées et plaisantes ; pour toujours plus d’épanouissement et d’amélioration de la santé tant physique que mentale en milieu urbain.

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